mercredi 19 décembre 2007

La culture française n'est pas morte pour tout le monde !


Internautes et intellectuels s'insurgent contre "la mort de la culture française"
(lemonde.fr - mardi 18 décembre 2007)

Où sont passés les Proust, Sartre, Ravel et autres Truffaut ? Qui est capable de citer un artiste français internationalement reconnu qui ne soit pas Johnny Hallyday ? Le journaliste Don Morrison du Time Magazine a mis le feu aux poudres en proclamant "La mort de la culture française" dans son édition du 3 décembre.


Derrière un titre à la "une" des plus provocateurs, le journaliste a bien aiguisé ses lames."Personne ne prend la culture plus au sérieux que les Français", commence-t-il, et pourtant la culture ici ne rayonne plus. Parmi les 727 nouveaux livres publiés cette automne, les centaines d'albums et les dizaines de films, une infime minorité seulement passera les frontières hexagonales. Il est temps de comprendre que "la France n'est plus ce qu'elle était, et encore moins ce qu'elle prétend être", résume Nonfiction.fr, un portail d'information consacré aux sciences humaines. A l'origine du marasme : le déclin de langue française bien sûr, l'inertie d'un art sous perfusion de subventions étatiques et le trop lourd héritage du "nouveau roman", à l'origine d'œuvres égocentriques et peu accessibles.

LE FANTASME "ÉMOUSTILLANT" DU DÉCLIN FRANÇAIS

Un constat accablant qui a provoqué une onde de choc dans la presse française et sur la Toile. Pour Laure Jareau de Nonfiction.fr, "la critique est parfois facile et les arguments ne sont pas toujours convaincants, mais on voit dans cet article comment la France et ses artistes sont perçus à l'étranger : un petit village gaulois résistant encore et toujours à l'envahisseur". Et le premier des Gaulois à s'être emporté n'est autre que l'académicien Maurice Druon. "Non, la culture française n'est pas morte !" clame-t-il dans une tribune du Figaro. "Ça recommence. Tous les quatre ou cinq ans, les Etats-Unis sont pris d'une fièvre antifrançaise que l'un de leurs grands médias se charge de communiquer à l'univers." Toujours, dit-il, les attaques sont guidées par la même confusion entre culture et divertissement. Or "la culture n'est pas dictée par le box office de la semaine", martèle le gardien du temple.

Même son de cloche sur la plateforme de blogs du Guardian. "Pour certains Américains, il n'y a rien de plus émoustillant" que le fantasme du déclin français, ironise la chroniqueuse Agnès Poirier. Et si la littérature française s'exporte mal aux Etats-Unis malgré la densité de sa production annuelle, c'est surtout parce que "le pays s'est barricadé entre quatre murs et a perdu son intérêt pour le monde extérieur", écrit-elle. Seuls 2,1% des livres publiés outre-Atlantique sont des traductions. Une forme de "chauvinisme" auquel Agnès Poirier oppose la "curiosité des lecteurs français".

D'ailleurs, renchérit Bernard-Henri Lévy, dans les colonnes du Guardian, "le discours des Américains sur la culture française en dit bien plus long sur eux que sur nous". En d'autres termes, c'est le discours de la culture dominante. Et surtout un discours auto-justificateur. Pourquoi ? D'abord, répond l'auteur d'American Vertigo, parce qu'"une culture qui n'intéresse pas les Américains est par définition faible". Ensuite, parce que "les Américains n'ont jamais tort", qu'à leurs yeux,"l'art n'est rien d'autre que l'industrie de l'art" et qu'un art qui brille, c'est avant tout un art qui s'exporte.

"L'IDÉE MÊME DE CHEF-D'OEUVRE A DISPARU"

A cet égard, Don Morrison évoque bien sûr Michel Houellebecq, auteur des Particules élémentaires et l'un des rares écrivains du cru à faire parler de lui à l'étranger. Mais quid de la vitalité de la production musicale et architecturale hexagonale ? Que ce soit "Daft Punk, Stardust, Etienne de Crecy ou Mojo, toutes les grandes figures de la French House sont internationalement respectées", souligne le correspondant de The Independent à Paris, John Lichfield. Sans oublier l'architecte Jean Nouvel, qui s'apprête à construire une nouvelle tour en verre à Manhattan, ou encore Christian de Portzamparc qui a pensé le "design" du futur musée du cinéma à Hollywood.

Or, la perception qu'ont les Américains de la culture française tient en une équation simple selon le chroniqueur littéraire du Nouvel Observateur, Didier Jacob : "De Gaulle+Sartre+la baguette+les seins de Sophie Marceau=la culture de la France." Le second problème, relève-t-il sur son blog Rebuts de presse, c'est que l'hebdomadaire américain "fait référence à une conception de la culture aujourd'hui largement dépassée". Il n'y a pas plus de Molière en France aujourd'hui, que d'Henry James aux Etats-Unis et, dans l'Hexagone comme partout, "l'idée même de chef-d'œuvre a disparu dans la seconde moitié du XXe siècle. Proust aujourd'hui n'aurait pas de sens. Ni Shakespeare, d'ailleurs", écrit le journaliste.

Finalement, c'est dans la diversité que réside la richesse nouvelle de la culture française. Don Morrison cite Yasmina Reza, Marjane Satrapi, Diam's et Abd Al-Malik comme autant de figures dynamiques d'une France mondialisée. "Adoptons la recette multiculturelle et nous serons sauvés", résume Antoine Compagnon dans une tribune du Monde et, conclut-il, "faisons surtout le pari, pour démentir tous les Perry Anderson et Don Morrison, que le roman de la France contemporaine est sous presse".

Elise Barthet

E.S.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

la culture française est morte, vive la culture française!

Audrey a dit…

Je suis révoltée par cette vision qu'ont les américains de la culture française....
Je dois bien avouer que les français ont cette particularité de penser que le monde tourne autour d'eux mais annoncer la mort de la culture frnaçaise est tout de même très excessif !!!!
Et je trouve le commentaire de Marion de totalement vrai !!!